Comprendre la « Garantie de départ » pour les séjours temporaires en Suisse
- Pavel VASILEVSKI
- 8 sept.
- 4 min de lecture
Comprendre la « Garantie de départ » pour les séjours temporaires en Suisse
Lorsqu’on planifie un séjour temporaire en Suisse, que ce soit pour des études, du tourisme ou d’autres motifs, il est essentiel de comprendre une exigence légale clé : la garantie que l’on quittera la Suisse à la fin du séjour autorisé. Cette condition est une pierre angulaire du droit suisse des migrations pour les résidents non permanents. Cet article vise à éclairer son origine, son application et les critères pris en compte par les autorités suisses, notamment à la lumière des événements internationaux actuels.
Origine et fondement légal
L’exigence de garantir le départ repose sur l’article 5, alinéa 2 de la Loi fédérale sur les étrangers et l’intégration (LEI). Cette disposition prévoit que si une personne entend séjourner temporairement, elle doit apporter l’assurance qu’elle quittera la Suisse à l’issue de ce séjour. Les séjours pour études ou formations, tels que les études universitaires, sont explicitement considérés comme temporaires selon la jurisprudence du Tribunal fédéral.
Ce principe juridique ne relève pas uniquement de la Suisse : il s’aligne aussi avec les règles de Schengen, qui accordent « une attention particulière » à l’évaluation de la « volonté de quitter le territoire des États membres avant la date d’expiration du visa demandé ». La Suisse, faisant partie de l’espace Schengen, intègre donc ces normes européennes dans sa législation nationale.
Quand la « Garantie de départ » est-elle applicable ?
Cette condition s’applique à différents types de séjours temporaires en Suisse, et pas uniquement aux études. En résumé, dès lors que le séjour n’a pas pour objet une résidence permanente, l’exigence s’applique. Cela comprend notamment :
Visas d’études et de formation : comme le montre un récent cas impliquant une jeune ressortissante russe, cette condition est appliquée de manière stricte.
Visas touristiques : pour de courts séjours, les demandeurs doivent également démontrer leur intention de retourner dans leur pays d’origine.
Autres permis temporaires : tout séjour de plus de 90 jours à caractère temporaire relève de cette exigence.
Critères et exemples examinés par les autoritésLorsqu’elles évaluent si le demandeur offre une garantie de départ suffisante, les autorités suisses procèdent à une analyse globale. Cela implique l’examen du profil du pays d’origine et du profil personnel du demandeur.
Profil du pays d’origine : les autorités considèrent la situation politico-socio-économique générale du pays de résidence. Des facteurs tels que l’instabilité politique, la pauvreté ou un taux de chômage élevé peuvent classer un pays comme « à risque » en matière de non-retour.
Profil personnel du demandeur (situation socio-économique) : les circonstances individuelles sont alors déterminantes. L’objectif est d’évaluer la stabilité socio-économique du demandeur et ses attaches à son pays d’origine. Les critères clés incluent :
Les attaches familiales et personnelles dans le pays de résidence (conjoint, enfants, famille élargie).
La situation professionnelle (emploi, niveau de salaire, activité indépendante, retraite) et la régularité des revenus.
Le statut social (exercice d’une fonction publique, représentation d’une ONG, professions à statut élevé comme avocat, médecin ou professeur d’université).
La propriété immobilière (maison ou autres biens).
L’historique de voyages : respect des conditions de visa lors de séjours antérieurs dans l’espace Schengen ou ailleurs.
Exemples jurisprudentiels :
Ressortissante ukrainienne : une femme invitée par son gendre s’est vu refuser un visa Schengen, malgré des attaches familiales et immobilières en Ukraine. Le Tribunal administratif fédéral (TAF) a relevé l’écart de niveau de vie entre l’Ukraine et la Suisse, craignant que son mari ne la rejoigne ensuite, laissant supposer une intention d’installation permanente.
Ressortissante camerounaise : à l’inverse, une femme célibataire ayant demandé un visa touristique d’un mois, secrétaire de profession, a obtenu gain de cause en appel. Bien que des disparités économiques existaient, le TAF a considéré ses responsabilités envers ses frères et sœurs, la gestion de terres héritées et un salaire nettement supérieur à la moyenne nationale comme des garanties fortes de retour. Le respect des visas antérieurs a également joué en sa faveur.
Le cas particulier des ressortissants russes et les sanctions
Le contexte géopolitique actuel influence fortement l’évaluation des demandes de ressortissants russes. En raison de la guerre contre l’Ukraine et des sanctions occidentales, la situation en Russie est jugée imprévisible et le risque de non-retour élevé. Les autorités suisses observent que les sanctions internationales poussent surtout des jeunes adultes instruits à quitter la Russie pour s’établir dans l’espace Schengen ou ailleurs. Dans ce contexte, la garantie de retour est jugée « très douteuse ».
Cependant, l’article 5, alinéa 2 LEI impose également un examen approfondi de la situation socio-économique individuelle du demandeur pour une décision complète, même si le pays d’origine présente un risque général de non-retour. Ainsi, un refus ne peut pas se fonder uniquement sur la nationalité ou la situation générale du pays.
Conclusion : au-delà des sanctions – le poids de la preuve individuelle
Bien que la situation en Russie et les sanctions internationales soulèvent des préoccupations légitimes, il est crucial de comprendre que le simple fait d’un contexte géopolitique défavorable ne constitue pas, en soi, une preuve suffisante qu’un individu ne peut garantir son retour.
Le droit suisse, en particulier l’article 5, alinéa 2 LEI, exige expressément un examen détaillé de la situation socio-économique personnelle du demandeur. Cela signifie que les individus issus de pays sanctionnés conservent la possibilité de présenter des preuves convaincantes de leurs attaches solides à leur pays d’origine. En documentant soigneusement leur stabilité financière, leurs liens familiaux importants, leurs perspectives professionnelles établies, leur propriété immobilière et leur respect passé des règles de visa, les demandeurs peuvent démontrer une intention crédible de retour. Ces preuves individuelles doivent avoir un poids déterminant, garantissant que les décisions soient prises au cas par cas, et non sur de simples présomptions liées au pays d’origine.
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